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Publié par Frédéric Baillette

 

    Bernadette était le titre d'un hebdomadaire illustré d'obédience catholique, destiné à la «formation chrétienne et humaine» de petites filles idéales ! Cette revue, lancée en 1914 (dernière parution 1963),  s'adressait aux fillettes, de 7 à 15 ans, avec notamment comme finalité de leur apprendre «à tenir un ménage, [à] conduire une maison», et se donnait pour mission de les guider «afin d'aller plus surement au ciel» (comme annoncée dans son 1er numéro du 4 janvier 1914).

 

Bernadette, n° 128, 7 décembre 1958

   Son titre reprend le prénom «de l'enfant privilégiée dont la Vierge Immaculée daigna faire sa voyante, son interlocutrice et son élève» : Bernadette Soubirous, une pauvre, «petite, maigre et pâle» bergère (selon un journaliste de l'époque), alors âgée de 14 ans, à qui apparu dix-huit fois (entre le 11 février et le 16 février 1858), une Dame blanche, rapidement identifiée comme ne pouvant être que la Vierge Marie. Ces apparitions et entretiens surnaturels avec la Sainte Vierge (qui lui confia 5 prédictions), eurent lieu dans la grotte de Massabielle (près de Lourdes). Une cavité d'où suinta, contre toute attente, une source d'eau aux vertus miraculeuses. Un jaillissement qui fut surtout une bénédiction pour le petit commerce local en se transformant en une inespéré source de profit (Lourdes devenant rapidement un des plus important centre de pèlerinage catholique — jusqu'à 6 millions de visiteurs annuels — et l'eau prodigieuse mise en bouteilles vendue aux quatre coins du monde - 49,90 € le bidon de 5 litres sur Internet). Une aubaine également pour une Église «alors en pleine perte d'influence», qui sauta sur ces apparitions Mariales (ou mariophanies : visions de la vierge Marie) pour, réaffirmer la prévalence de la foi dans le surnaturel et le divin et «se refaire une santé à coups de miracles» ! [1]
    Rentrée rapidement au couvent, Bernadette décédera en 1879, à 35 ans, et sera canonisée en 1933 sous le nom de Sainte Bernadette Soubirous.

 

[1] Pierre Ancery, « Les apparitions de Lourdes en 1858, un miracle très polémique », publié sur le site retronews.fr le 30 juillet 2018.

 

    Outre des récits de vies exemplaire, des biographies de Saintes ou de pieux conseils, la revue Bernadette publiait des bandes dessinées à «but édifiant et distrayant».
On trouve ainsi dans le numéro du 11 juillet 1937, une historiette de 4 pages nous révélant la bienheureuse apparition du «Jeu du volant»... (voir en fin d'article l'intégralité de cette publication) Une piste pleine de surprenantes illuminations qui restent toutefois à authentifier pour que soit reconnue la source féconde du futur badminton.

 

Du bilboquet, aux billettes, boquets et billettes ailées !

    Selon Bernadette (la revue), l'invention du jeu du volant serait «généralement attribué à la princesse Marguerite d'Angoulême», soit la sœur du roi François 1er et la grand-mère d'Henri IV, qui vécu de 1492 à 1549...
    Astucieuse, maline et (nous le verrons) intrépide, la précoce Marguerite aurait eut, à l'âge de 12 ans, l'idée de «remplacer les boulets en fer», (soit-disant) utilisés par de jeunes seigneurs pour s'exercer au bilboquet, par «de petites balles en bois très léger», qu'elle recouvrit «d'une enveloppe de velours ou d'étoffe quelconque»... (les prémisses du futur «bouchon»)
Des petites billes de bois qui donnèrent, toujours à en croire la fertile imagination de Bernadette, le nom au jeu dont elle inventa les règles : «la billette». Un amusement qui, par un habile subterfuge, donnera, quelques décennies plus tard, naissance au jeu du volant...
«Les règles de la billette [...] étaient les mêmes que celles du bilboquet», précise Bernadette : une pénitence (un gage) était attribué à la maladroite qui «laissait tomber le projectile qu'on se lançait de l'un à l'autre [avec des tambourins - voir illustration d'introduction], ou des unes aux autres, lorsque les joueuses étaient deux ou plus».

    Marguerite se montrait passionnée par le jeu de la billette qui remplissait tous les instants «qu'elle ne consacrait pas à l'étude ou aux exercices de piété». Ses journées, studieuses et pieuses, étaient donc louablement bien remplies.

    Or un jour,  pour faire parvenir discrètement un message informant son frère (François 1er), emprisonné à Madrid par l'Empereur Charles-Quint (suite à la désastreuse défaite de Pavie, 1525), d'un projet de délivrance conçu par ses fidèles vassaux, elle imagina un osé stratagème. Afin de tromper la surveillance des arquebusiers, féroces gardiens du donjon où croupissait François, elle s'en alla jouer à la billette sous les murailles du château avec sa copine (la señorita Inès Médina-Cœli). Les demoiselles se positionnèrent et commencèrent à se renvoyer les billettes avec leurs «boquets» !

    Ainsi apprend-on au détours de cette précision, grâce à Bernadette, que les tambourins utilisés pour se renvoyer les fameuses billettes, issues d'une miniaturisation des boulets utilisés au bilboquet, étaient, tout simplement, appelés boquets

    Mais revenons à Marguerite pour assister à la confection du tout premier «volant» !
Laissant sa compagne de jeu la faire reculer «à chaque coup de boquet», Marguerite se retrouva vite au pied du donjon, pour le plus grand plaisir des gardiens, égayés par le spectacle «d'un jeu qui leur avait été jusqu'alors inconnu».
La débrouillarde enfant qui avait prévu son coup, ajouta alors «un perfectionnement» aux billettes. Sortant de son «aumônière [petite bourse contenant des piécettes destinées aux gueux, par charité chrétienne] de petits morceaux de papier préparés d'avance». Elle les fixa aux billettes, leur donnant ainsi «arrangées» l'allure d'oiseaux, puis se remis à jouer. «Ces billettes ailées inventées par Marguerite redoublèrent la joie des gardiens.» 

    Or, «les ailles [...] fixées aux billettes n'étaient autre chose que des lettres par lesquelles elle prévenait son frère du complot tramé par les seigneurs français» (dans le but de le délivrer). 

    Une billette, «projetée avec autant de force que d'adresse, alla s'embarrasser [se coincer] dans les barreaux contre lesquels le prisonnier», lui aussiprofitait du spectacle. François 1er s'en empara et fut ainsi averti des intentions et du «dévouement de ses sujets» [2].


 [2] S'il est vrai que sa frangine, Marie d'Angoulême, rendit bien visite à Madrid à François, ce qui lui requinqua le moral, le Roi de France ne sera libéré qu'au terme d'un an de captivité, après avoir versé une solide rançon et signé le Traité de Madrid. Des promesses, qu'une fois libéré, il s'emploiera à rendre caduques, ce qui relança la guerre avec Charles-Quint.

 

Avènement de la divine Raquette

    Par la suite, dixit Bernadette, «le jeu des billettes ailées fut promptement adopté par les jeunes Castillanes» et rapidement «connu dans presque toute l'Espagne. Marguerite le fit connaître aux Navarraises lorsque, par son mariage avec Henri d'Albret, elle devint reine de Navarre [elle est ainsi également connue sous le nom de Marguerite de Navarre]. À cette époque, les deux ailes de papier furent remplacées par des plumes de coq, d'oie ou de paon qui rendaient le vol du jouet moins rapide et plus régulier.»

 

    Le volant était né ! Ne restait plus à Bernadette qu'à élucubrer l'apparition de la raquette, en remplacement des dits Boquets !

    C'est, toujours selon la fertile Bernadette, cette fois-ci à Marie Stuart (1542-1567) que l'on doit son surgissement...
Un jour, où elle était de passage au Louvre, celle qui été devenue reine d'Écosse à 6 mois, puis un temps reine de France et finit décapitée sur ordre de la reine d'Angleterre, croisa «plusieurs demoiselles jouant à la billette [ailée]. Elle se mit de la partie et reçut le projectile sur son éventail». Fragile accessoire, alors composé «d'un manche surmonté d'une palette en carton ou en bois très léger peinte et entourée de plumes.

    Plusieurs joueuses imitèrent Marie Stuart, mais, comme l'explique Bernadette à ses jeunes ouailles, les éventails se brisèrent ou s'abimèrent rapidement.
    Marie Stuart, qui préférait cette manière de jouer, ne voulut plus se servir de boquet. Elle pria le menuisier de la cour de lui faire des éventails plus forts.
     Cet homme, nommé Jean Raquette, comprit l'intention de la princesse et inventa alors l'instrument qui porte encore son nom aujourd'hui : la
raquette.» 

    Ainsi apparue la divine raquette !
    Jouez hautbois, résonnez musettes, chantons tous son avènement ! [3]


[3] Emprunté au traditionnel Chant de Noël, « Il est né, le divin enfant ». Publié pour la première fois en 1862, dans un recueil d'airs de Noël Lorrains, par Jean-Romain Grosjean, organiste à la Cathédrale de Saint-Dié-des-Vosges.

Bernadette, n° 393, 11 juillet 1937 — © Collection particulière
L'Apparition du Jeu du Volant, selon (Sainte) Bernadette !
L'Apparition du Jeu du Volant, selon (Sainte) Bernadette !
L'Apparition du Jeu du Volant, selon (Sainte) Bernadette !
L'Apparition du Jeu du Volant, selon (Sainte) Bernadette !
L'Apparition du Jeu du Volant, selon (Sainte) Bernadette !
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