Jeux de lance et attrape volants
À partir du XIXème siècle, parallèlement à l'ancien et populaire jeu du volant, sont apparus différents jeux pour enfants et/ou jeunes gens utilisant également des volants, identiques ou similaires. Des volants n'ont pas à simplement échanger avec des raquettes, mais à capturer à l'aide d'instruments ad hoc, permettant de les lancer mais aussi (et surtout) de les attraper, soit en les contrôlant dans une sorte de cône évasé (un «entonnoir»), soit en les captant à l'aide d'une baguette pointue, avant de pouvoir les renvoyer.
Si certaines de ces inventions, notamment les plus anciennes, ont connu un certain succès dans les milieux aristocratiques et aisés, et enrichissent les «greniers» de collectionneurs avertis, d'autres n'ont eu qu'une brève voire une anecdotique existence. N'en subsiste alors que quelques traces laconiques, dans des catalogues de ventes, des encarts publicitaires, ou d'intrigantes descriptions qui, faute d'avoir déniché une authentique version, laissent subsister des interrogations sur leur matérialité et leur destin...
Une dizaine d'amusements constitue cet inventaire de jeux de lance et d'attrape volants (ou objets volants). Quelque-uns apparus plus tardivement (dans les années 1930-1960), ont également retenu notre attention car de la même veine que les précédents.
Le lecteur peut se rendre directement à l'objet de lancer-attraper suscitant sa curiosité en cliquant sur le jeu qui l'intéresse :
«Le volant assis ou aux cornets» (vers 1823)
Le Volant Bague (vers 1826)
encore appelé par certains contemporains «volant à la pointe»
ou «volant au bâtonnet» (1826), puis Volerette (1913)
Le Jeu de Cylicione (vers 1869) et le Par-Ball (1911)
Le Volant Rapide (vers 1880) ou «Lance-Volants» (1893)
Jeu de l’Entonnoir-Volant (Napoléon Laisné, 1883)
Le Volant Comète (début XXème)
Le Tir au Volant (une anecdotique élucubration romanesque - 1885)
Le Bilboplume (1923)
Le Volant-Bilboquet (1890)
Le VoliPlay (années 1930)
La Sarbacane aux Volants (1934)
Le Whirly-Bird Game (1958-1960)
«Le volant assis ou aux cornets» (vers 1823)
ou «Jeu au cornet», «jeu de Cornet» (1832), ou encore «Volant à Cornet» (1891)
Selon Paulin-Désormeaux (1826), ce jeu bien «moins répandu», que le jeu du volant (qualifié de «volant ordinaire»), semble toutefois avoir rencontré un certain succès au début du XIXème siècle dans les milieux aristocratiques.
On en trouve mention en 1823 dans Jeux des jeunes filles de tous les pays, ouvrage illustré de 25 lithographies, accompagnées de poèmes et de textes «explicatifs» :
Jeux des jeunes filles de tous les pays, Paris, 1823, p. 45 – Source GallicaBnF
Paulin-Désormeaux en donne une description, accompagnée d’une illustration, dans le tome 4 de ses Amusements à la campagne (1826) (une somme où l’auteur a recueilli «tout ce qui peut contribuer à charmer les loisirs de ceux qui habitent à la campagne») :
«Le volant assis ou aux cornets a fait fortune il y a quelques années, écrit-il. On substitue à la raquette un cornet de cuir ou de carton verni, fixé au bout d’une baguette d’un pied à dix-huit pouces de longueur [environ 45,60 cm]. On reçoit le volant dans le cornet, et on le lance à son vis-à-vis, qui le reçoit de la même manière. Ce jeu n’est pas aussi facile que le volant ordinaire, il est aussi moins répandu.» [1]
En 1903, Henry-René d’Allemagne, reprendra partiellement cette description dans Musée rétrospectif de la classe 100. Il estime alors que «ce jeu n’eut pas une bien longue durée», jugeant qu’en 1826 Paulin-Désormeaux (qu’il ne cite pas) le considérait déjà «comme démodé». D’Allemagne ajoute que l’«on raconte qu’en 1829 la duchesse de Berry était encore une joueuse de volant [au cornet] très distinguée ; elle comptait aisément jusqu’à deux cents points sans que le volant qu’elle recevait manquât une seule fois l’entrée du cornet.» [2]
On peut imaginer qu’à la différence du jeu du volant, où il s’agissait surtout de multiplier les échanges dans un esprit de mutuelle coopération, au jeu du cornet, les «adversaires» devaient avant tout montrer leur habileté à bien attraper et contrôler le volant qui leur était adressé.
Il devait également être possible d'y jouer en solitaire, comme avec un bilboquet.
En 1825, dans un ouvrage consacré aux Petits Jeux innocens [sic], Pierre-Antoine-Augustin, Chevalier de Piis (haut fonctionnaire de police, homme de lettres et dramaturge), fit l’éloge, en vers, du «volant debout» (soit du jeu du volant). Un exercice, selon lui, bien plus éprouvant que le «volant assis», soit le volant aux cornets qui, à le croire, se jouait surtout confortablement installé sur une banquette…
« Gloire au volant,
qui bondit sur la raquette,
Et dont l'élan,
Turbulent
Fait valoir le plumet blanc !.
Quant au volant
Vacillant,
Qu'en baillant
On attend
Sur sa banquette,
Je le déclare indolent,
Et vraiement [sic]
Bon à laisser sur le flanc... » [3]
Cette chansonnette, extraite d'une scénette de quatre pages, est précédée d’une lithographie, signée Aubry, représentant simultanément les deux jeux, ici essentiellement pratiqués par des jeunes filles :
Lithographie de Aubry, extraite de Les Petits Jeux innocens, Paris, Augustin Le Grand Éditeur, 1825.
Selon le Chevalier de Piis, si le volant debout essouffle à force de courir après l’étourdi et turbulent volant, de s'évertuer à attraper ce malicieux qui «se jette à droite et à gauche, [...] élude [l]a raquette» et doit «se laisser ramasser à chaque minute», l'«on n’éprouve point un inconvénient aussi grave» avec le volant assis, qui se révèle nettement moins fatiguant. Et détruit rapidement les volants : les «entonnoirs en fer blanc […] lourds et raboteux» (par rapport à la raquette «douce et légère»), «bris[ant] ses côtés […] chaque fois qu’il devient fugitif» :
Même constat en 1832, dans l’abécédaire L'Étude et la récréation, où «l’ancienne manière» de jouer au «Volans» (avec des raquettes) apparaît bien plus propice à développer les «forces corporelles» que «les cornets où l’on prend moins d’exercice» [4] :
Volant au cornet et volant «ordinaire» (ou «à l’ancienne») apparaissent régulièrement représentés ensemble dans les lithographies et estampes éditées dans les années 1820-1830. Les jeunes gens tenant des cornets sont alors souvent placés au premier plan, comme mis en avant, peut-être pour que le lecteur puisse identifier une pratique récente, moins connue.
Un divertissement susceptible d’intéresser aussi les jeunes garçons, comme sur cette superbe illustration publiée en 1827 dans Le Bon Génie. Journal des Enfants :
En 1890, dans Jeux et exercices des Jeunes filles, Madame de Chabreul conseillera encore, «si l’espace manque pour jouer avec une raquette, […] de se servir de cornets de bois et de volants légers» [5] .
En 1891, Julien Delaunay en fait toujours état dans son Recueil de jeux et exercices. Pour le Développement des Aptitudes physiques de la jeunesse [6] :
Deux illustrations de parties de volant au cornet, datant du début du XIXème siècle, agrémentent l’ouvrage de Henry-René d’Allemagne, Musée rétrospectif de la classe 100 :
- La première est réalisée d’après une lithographie d’Auguste-Xavier Le Prince, datée de 1823. Une illustration à l’origine en couleur, publiée dans Jeux des Jeunes Filles de tous les Pays, représentés en vingt-cinq lithographies (disponible sur GallicaBnf, numérisée en noir et blanc). L’illustration ci-après est extraite de l’ouvrage de Henry-René d’Allemagne (elle est téléchargeable sur Gallica.BnF ou sur Google Books) ;
- La seconde illustration reprend une estampe destinée au jeu de la fantasmagorie (projection d’images fixes ou animées sur une toile – voir sur ce même blog : «Et le volant s’anima !») (elle figure également dans l'ouvrage précité de Henry-René d'Allemagne) :
À bien examiner une gravure, attribuée à Langlumé (très certainement Pierre Langlumé, imprimeur et lithographe du début du XIXème, 1790-1830), on découvre parmi les trois couples échangeant un volant, un couple jouant avec des cornets (au centre de l’image et légèrement en arrière-plan) :
Source de l’image : Henry-René d'Allemagne, Sports et Jeux d'adresse,
Paris, Hachette, 1913, p. 188.
Signalons, pour conclure que, selon un site d'expertise en jeux anciens, le jeu de «lance-volant» pouvaient être également appelé «jeu de gobelets vertical».
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Illustration communiquée par le site Collection de Jeux anciens
Le «Volant Bague» (vers 1826)
Encore appelé «volant au bâtonnet» ou «Volant à la pointe» et Volerette (vers 1913), il est une variante des cornets.
Paulin-Désormeaux en donne cette description en 1826 :
« Il existe encore une autre variété [de jeu de volant], moins connue que la précédente ; ce n’est plus un cornet dont on se sert pour recevoir le volant, c’est un bâtonnet qui se termine en pointe, comme le côté menu d’un bilboquet […]. A trois pouces de la pointe est une embase, ou arrêt qui sert à retenir le volant et à l’empêcher de glisser le long du bâton. Le volant, dans cette variété, affecte une forme propre à cette manière de le jouer. C’est un anneau de bois dur […], sur lequel sont implantés des plumes. »
Un amusement dont il invite à fabriquer soi-même les instruments, pour peu que l’on demeure à la campagne et que l’on sache faire fonctionner un «tour» [7] :
En 1854, le particulièrement fécond romancier Paul de Kock, se gausse, dans un passage dans de La Bouquetière du Château-d’Eau, d’une «partie de volant à la pointe», nouveau jeu de salon auquel on joue assis et «qui plaît beaucoup aux dames». Un jeu où l'on passe surtout beaucoup de temps à ramasser «le volant que les joueurs ne reçoivent guère avec leur pointe...» [8] :
Au début du XXème siècle, apparaîtra une version «modernisée» de ce jeu, sous l’appellation de «jeu de la Volerette».
On en trouve une lapidaire mention durant tout le mois de mai 1908 dans la rubrique Petites annonces du journal L’Action Française : «Un jeu nouveau : “La volerette”», sans autre précision.
Puis une sobre représentation dans une publicité parue dans un guide commercial : Le Courrier du 19 février 1913, où La Volerette est présentée, publicité oblige, comme «le plus agréable des Jeux de plein air» :
La même année, l'hebdomadaire La Semaine de Suzette, qui s'adresse aux fillettes et jeunes filles des classes aisées, lui consacre un article à ce «nouveau jeu, qui est un dérivé du jeu de volant, [et] est appelé à un grand succès. Sans être difficile, il demande cependant assez d'adresse pour être intéressant et amusant tout à la fois.»
Le dernier paragraphe explique comment y jouer, seul ou à deux :
«Pour jouer seul, on met la volerette à l'extrémité de la baguette et on la lance verticalement de bas en haut. Il s'agit de la rattraper au bout de la baguette.
Pour jouer à deux personnes, on place la volerette contre la garde de la baguette et on la lance, les plumes en avant, dans la direction de son partenaire. Celui-ci doit l'attraper au bout de sa baguette et la relancer aussitôt.»
«Le Jeu de Cylicione» (1869)
Ce jeu au nom bien étrange est apparu dans les années 1969. Il n’est qu’une variante plus sophistiquée du précédent «volant au cornet», avec des «cloches» ou des gobelets inclinés en métal, fixés sur un manche en bois. Un modèle breveté le 3 juillet 1869, par le dénommé René Guimard.
Les règles du jeu, illustrations à l’appui, figurent collées sous le couvercle des boîtes contenant les instruments du jeu :
Cette «notice» le présente comme un jeu de «lance-volant» pour «gymnastique de salon» et souligne ses «Avantages» :
«Comme exercice de salon, il comble une lacune regrettable au point de vue de l’éducation physique des enfants ; car il permet de faire dans le salon un exercice salutaire, ce qui est très appréciable pendant les mauvais jours et pendant l’hiver.
Il est très gracieux, très attrayant pour les enfants, très-facile même à jouer. — Il convient parfaitement aux jeunes filles délicates et dont la tenue laisse à désirer, en contribuant énergiquement au redressement de la tête et à l’effacement des épaules.»
Sur la partie droite de ce document, sont prodigués des conseils pour y bien jouer :
«Pour recevoir facilement le volant dans la cloche, il faut avant tout s’exercer à lancer le plus haut possible, afin de retarder la descente du volant ; tenir l’orifice de la cloche horizontal.
Pour bien lancer, il faut serrer fortement, en donnant une impulsion au moyen de l’avant-bras et du poignet, et s’élever en même temps sur le pointe des pieds, la tête renversée en arrière» !
Illustrations à l’appui, différents exercices sont proposés :
«N°1. – S’exerce à lancer le volant verticalement au-dessus de la tête, le plus haut possible.
N° 2. – Jouer à deux, avec un ou deux volants à la fois ; s’exercer des deux mains, debout et assis.
N° 3. – Lancer le volant d’un bras et le recevoir de l’autre, et réciproquement.
N° 4. – Lancer par un effort du poignet et de l’avant-bras ; suivre des yeux le parcours du volant.»
La Règle du Jeu y est succinctement précisée :
«La partie se compose du nombre de points convenus. On doit compter le nombre de coups ; le coup est bon si l’on évite au volant de tomber à terre.»
Selon le site Varenne Enchères, ce jeu ne connut qu’une très brève existence, «en raison de la guerre de 1870 […] qui stoppa net [son] développement»…
L’origine du nom donné à cet amusement reste pour nous une énigme… Sa consonance le rapproche de «Cilicione» qui en Italie est le nom vulgaire donné à une plante (le Senecio), soit le Séneçon commun (du latin senex : vieillard), une herbacée à fleurs jaunes ou orangées dont les fruits à aigrettes blanches sont comparés à une chevelure de vieillard (cf. «Senecio. Séneçon», in Gaston Bonnier, Flore complète illustrée en couleurs de France, Suisse et Belgique, Tome V, 1914-1935, p. 79.)
Il est vrai que la forme du bulbe, terminant une longue tige, n’est pas sans rappeler celle des «gobelets» du jeu de Cylicione… et que la fleur elle-même rappelle la forme d'un volant (bouchon orangé et plumes d’or) !
Détail d’une gravure de «Senecio Petasites», 1901, Collection Bibliothèque numérique Hortalia.
Illustrations communiquées par Laurent Bodart,
collectionneur de Jeux anciens
Au début du XXème siècle, apparaîtra jeu s'inspirant du jeu de Cylicione, ou tout au moins lui ressemblant fortement : Le Par-Ball. Un jeu qui, en 1911, obtint une médaille d'argent au Concours Lépine et que la notice qui l'accompagne décrit comme «gracieux, captivant et [...] sportif, lorsqu'il est joué à distance par les deux sexes de tout âge, qui rivalisent d'adresse à faire partir la balle ou à la parer [la rattraper], d'où son nom "Par-ball"».
Certes, ici pas de volant, mais une balle. Toutefois, un jeu utilisant des «cornets», fixés à l'extrémité de baguettes. Des «cornets souples» dont la forme n'est pas sans rappelle celle d'un volant ! Un objet «de forme élégante et légère», démontable, pouvant se «mettre en poche» :
Tout comme le jeu de Cylicione, le Par-Ball est un jeu de lancer-recevoir.
Un lancer qui, dans le relâché-serré de la prise et la vivacité du coup de poignet, n'est pas sans analogies avec la frappe d'un volant, en badminton, à suivre les conseils prodigués par le «mode d'emploi» : «Tenir l'appareil par l'extrémité du manche sans le serrer, de façon à ce qu'il flotte dans la main, lancer vivement le cornet en avant et [l'arrêter] dans sa course, par un serrement de la main sur le manche».
Les 5 pages du livret accompagnant ce jeu sont disponibles en Annexe.
Illustrations et documents communiquées par Laurent Bodart,
collectionneur de Jeux anciens
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«Le Volant Rapide» ou «Lance-Volants» à ressort
Ce jeu aux instruments sophistiqués fait partie des jouets mécaniques qui utilisent un «ressort simple». Il est apparu dans les années 1880.
On en trouve une toute première présentation en 1884, sous l’appellation de Volant Rapide (sans doute pour souligner la puissance de son éjection), dans un catalogue où il est décliné en 4 tailles, avec des tarifs progressifs :
Qualifié de «jeu gracieux destiné à l’appartement» par Mme Gustave Demoulin, autrice de Les Jouets d’enfants (1882) [9] , ce jeu d’intérieur semble avoir connu un certain succès, puisqu’il est mentionné en 1887, dans l’Annuaire-Almanach du Commerce, de l’Industrie, de la Magistrature et de l’Administration (p. 464) et qu’il est encore présenté à la vente en 1893 dans le catalogue du magasin parisien «Au Bon marché», cette fois-ci sous le nom de «Lance-volants» :
Le Grenier de Pascal (que nous ne pouvons que vous conseiller de visiter) en recèle un très bel exemplaire, présenté dans son coffret d’origine.
On observera la solidité des «bouchons» en bois plein, capables d'encaisser l’impact du ressort (au risque d’occasionner quelques dégâts dans le mobilier décoratif), bien que d’autres modèles utilisaient des volants aux bouchons bien plus tendres (voir second coffret) :
« Ball-Trap» et «Lance-Balle»
À la même époque était proposé un jeu similaire avec des balles, actionné soit, semble-t-il, avec une poire (voir 1ère illustration), soit également par l'intermédiaire d'un ressort :
Ce Ball-Trap ou Lance-balle est présenté, sur l’illustration figurant sur le couvercle d’un coffret, comme un jeu de Salon et de Jardin, alliant hygiène et récréation, et pouvant convenir aussi aux Grandes personnes :
«Le Lance-Balle par sa grâce et l’exercice qu’il procure EST le JEU qui réunit à la fois l’hygiène et l’Agréable.
Les Grandes Personnes aussi bien que les enfants peuvent avec un réel plaisir se livrer à ce jeu charmant.»
Plus d'images à découvrir dans Le Grenier de Pascal
«Jeu de l’Entonnoir-Volant»
une «modification du jeu de Cornet» imaginée par Napoléon Laisné, en 1883
À la fin du XIXème siècle, Napoléon Laisné, ancien inspecteur de gymnastique dans les Écoles de la ville de Paris et fervent protagoniste des exercices physiques dans le développement et l’hygiène, renoue avec les précédents jeu de lance-volant, en faisant la promotion d’une de ses nouvelles inventions : «Le jeu de l’entonnoir-volant», ressemblant certes «beaucoup au jeu de cornet pour les mouvements ; mais […] un peu plus difficile » et «en revanche […] plus gracieux et plus élégant» [10].
Le cornet a été remplacé par une pique (B sur le document ci-dessous), et un entonnoir a été fixé au bouchon du volant (fig. C).
Dans son ouvrage, Laisné donne des explications, quelque peu difficiles à saisir, quant à sa manipulation. Nous laissons le soin au lecteur de les décortiquer :
Napoléon Laisné, «Jeu de l’Entonnoir-Volant», in Gymnastique des demoiselles à l’usage des Écoles Normales de lycées et collèges de jeunes filles des pensions et des école s.Ouvrage indispensable aux aspirantes aux brevets de capacité, Paris, Librairie Picard-Bernheim et Cie, 1883, 5ème édition, pp. 181-183.
La dite «invention» de Laisné semble ne pas avoir connu un grand succès, bien qu’en 1893, Louis Harquevaux et L. Pelletier la citent dans 200 jeux d’enfants en plein air et à la maison, classant L’Entonnoir à Volant parmi les «jeux d’action avec instruments pour jeunes garçons et jeunes filles», entre Le Volant et Les Grâces [11].
Un jeu qui, selon ces auteurs, pouvaient rassembler jusqu’à 8 joueurs.
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«Le Volant Comète»
Dans les années 50 apparaît «Le Volant Comète», présenté dans sa notice comme une nouveauté «sans danger» qui «s’adresse aux grands comme petits».
Sa structure emprunte la fois au «volant à la pointe» et à la volerette. La dite comète se présente, en effet, sous la forme d’«un gros volant en caoutchouc évidé» qu’il s’agit d’envoyer et de récupérer avec des «baguettes de bois verni», très effilées, munies «d’une bague d’arrêt pour éviter que la Comète ne vienne frapper sur la main à réception».
Un amusement «étudié pour augmenter les réflexes, développer le coup d’œil, et [faire] travailler tous les muscles», que son concepteur invite à pratiquer en «appliqu[ant] les règles du jeu du tennis pour le décompte des points» :
Ce Volant Comète a peut-être emprunté son nom à une jeu d’adresse antérieur, le «Jeu de la Comète», dont on trouve une mention manuscrite en 1881 (dans un catalogue), et une présentation illustrée dans un autre document (qui demanderait à être daté) :
Le Tir au Volant (1885)
Pour l’anecdote, on trouve dans un roman publié en 1885 par Henry Rabusson (L’Aventure de Mlle de Saint-Alais), la description d’une bien curieuse manière de jouer au volant qui s’apparente à du tir au pigeon ou à du Ball-trap ! Puisqu’il s’agit de «trouer à coup de fusil la pelote emplumée» ! Un volant «de forme spéciale», expédié dans les airs à l’aide d’une raquette à ressort, à tenter de pulvériser avant qu’il ne revienne sur cette même raquette «sur laquelle [le] ramenait un mécanisme des plus ingénieux» ! [12]
Une élucubration champêtre à découvrir ici :
Ce jeu dont le nom emprunte au bilboquet est présenté par l’hebdomadaire Le Petit Inventeur du 4 décembre 1923. S'il peut se jouer seul (et alors relever de la jonglerie), il est avant tout un jeu d'opposition en un contre un, où les protagonistes occupent chacun un camp, coupés par une «ligne de séparation». Chaque camp est divisé en 4 zones : une zone avant (ou «avant-camp») et une zone arrière constituée de 3 zones : un «camp centre», encadré de deux «camps de côté».
La mise en jeu s’effectue en se plaçant derrière la ligne délimitant le «camp-avant» et doit franchir la «ligne de séparation».
Pour espérer marquer des points, le volant doit également dépasser la zone avant et atteindre l’un des 3 «camps» arrières.
Si les matchs se disputent en 15 points, leur comptabilité se révèle plutôt compliquée :
- 1 point est marqué par le camp adverse si le volant ne franchit pas la «ligne de séparation», ou s’il sort des limites du terrain ;
- Aucun point n’est marqué si le volant tombe dans l’«avant-camp» adverse ;
- 3 points sont marqués par le receveur s’il parvient à capter le volant «au bout de sa canne» dans son «camp-avant» ;
- 1 point est marqué par le lanceur si le volant tombe dans le «camp central» de l’adversaire (sans que celui-ci ne le contrôle) ou par le receveur s’il s’en saisit dans ce même périmètre ;
- Enfin le receveur marque 2 points, s’il contrôle avec sa canne un volant dans l’un des «camps de côté» (toutefois, rien n’est précisé sur le nombre de points remporté par le lanceur lorsqu’un volant tombe dans ces mêmes zones…).
Le volant est envoyé «au moyen d’un bâton sur lequel se trouve enfilé un ressort que l’on tend et puis qu’on lâche». Un bâton dont l’extrémité conique rappelle celle des précédents entonnoirs, gobelets ou cornets, qui devait également servir à capter le volant…
Encore faudrait-il retrouver les instruments d’un jeu encore annoncé en 1925 dans l’Annuaire du commerce Didot-Bottin :
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Volant-Bilboquet (1890)
Un jouet pour enfant équipé lui aussi d’un ressort propulsant un volant qui ensuite doit être récupéré dans un des «trous» numérotés de ce «bilboquet»… Un objet (aujourd’hui sans doute bien rare) dont on trouve une présentation en décembre 1890 dans La Revue des Nouveautés (Organe des comptoirs de spécialités brevetées, n° 4, décembre 1890, Paris, p. 5) :
Quelques décennies plus tard, dans les années 1930, apparaîtra un jeu aérien, sportif et amusant, rappelant le Volant-bilboquet, mais au mécanisme bien plus élaboré : Le VoliPlay (ou Voli-Play). Un jeu pouvant se «pratiquer soit en appartement, soit en plein air», en utilisant dans le premier cas une hélice à 6 pales, et dans le second une hélice à 4 pales («qui monte plus haut»), comme indiqué en note au bas de la «Règle du jeu» :
Source des trois précédentes images : Le Grenier de Pascal
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«Sarbacane aux Volants» (1934)
un jeu pour les garçons !
Une sorte de jeu de fléchettes avec des «volants», propulsés par une sarbacane («absolument inoffensive») faite d'un roseau, en direction d’une cible, sur laquelle ces projectiles laisseront une trace si l’on «a soin de frotter le liège [du bouchon] sur de la craie finement pilée» !
Un jeu à fabriquer soi-même, imaginé en 1934 par Pierrot, le Journal des Garçons (n° 44, 4 novembre 1934, p. 12).
Whirly-Bird Game (vers 1958-1960)
Un jeu américain présentant lui aussi une cible, excepté que ce n'est plus au lanceur de l'atteindre mais au receveur d'attraper le Whirly-Bird, un « oiseau tourbillonnant », le plus près de son centre. Ce volant-fléchette, conçu pour entrer en rotation (produire un effet Whirly) à son lancement, est muni d’un embout en caoutchouc, une ventouse, pour adhérer à la cible : un disque métallique équipé d’une sangle élastique où glisser sa main pour son maintien, avec lequel les joueurs tentent d'intercepter le Whirly-Bird. Des paddles annoncés bien moins onéreux que des raquettes de badminton («Instead of expensive badminton rackets»).
Sur la face antérieure du disque, des anneaux colorés et numérotés donnent de 1 à 4 points au receveur, en fonction de la zone avec laquelle il contrôle le «volant».
Les informations portées sur la boîte conseillent de disputer des parties courtes, en 21 points, ou longues, en 101 points, en se plaçant à une distance de 20 à 60 pieds (le Whirly-Bird pouvant parcourir une distance comprise entre 50 et 60 pieds).
À l’origine la cible, brevetée en 1956, n’avait que 3 anneaux. Un quatrième a été ajouté, l'année où l’éditeur du jeu fit appel à Warren Spahn, l’un des plus célèbres lanceurs de la Major League de Baseball, pour le promouvoir. Sous l'image, on peut lire «Warren Spahn, le célèbre gaucher des Milwaukee Braves, aime jouer à Whirly Bird», un divertissement d'intérieur comme d’extérieur (pour la plage ou l'après pique-nique), qualifié de «sain et actif», développant «la coordination oculaire et musculaire» !
Source des illustrations : «Warren Spahn Whirly Bird Pay Catch Game», Site Keyman Collectibles
Dans les prochains volets de cette recherche, consacrée aux jeux utilisant des «volants», nous listerons les amusements de plein-air privilégiant l'échange entre partenaires mais n'utilisant pas de raquettes (bing-it, bing-bong, Tamburelli, Wabiba Voli, etc.), nous nous intéresserons ensuite à des divertissements sportifs qui se sont inspirés du badminton (Volley-Shuttle, Dougledyas, Fly-Ball, Table Badminton, etc.), nous nous arrêterons sur des jeux de badminton miniaturisés, et présenterons quelques jeux d'adresse, voire sportif, relevant de logiques identiques aux jeux de volants, mais utilisant d'autres «projectiles» («bagues», «anneaux»).
Remerciements
Nous tenons à remercier, pour nous avoir communiqué et autorisé à utiliser des documents :
Laurent Bodart, collectionneur, administrateur du site Jeux Anciens
Pascal, collectionneur, administrateur du site Le Grenier de Pascal
Alain Rabussier, collectionneur, administrateur du blog Collection de Jeux Anciens
Pascal Bernon, Collectionneur d'objets anciens relatifs au badminton et au jeu du volant
et Jean-Jacques Bergeret, membre de la Commission Culture de la FFBaD.
[1] ↑ A. Paulin-Désormeaux [1785-1859], Les Amusements de la campagne […] recueillis par plusieurs amateurs […], Tome 4, Chapitre XXII : «Le Volant», Paris, Audot Libraire-Éditeur, 1826, p. 222. ↑
[2] ↑ Henry-René d’Allemagne, Musée rétrospectif de la classe 100. Jeux à l’exposition Universelle Internationale de 1900, à Paris, Tome Ier, 1903, p. 216 .
[3] ↑ Pierre-Antoine-Augustin, Chevalier de Piis, «Le Volant debout et assis», Les Petits jeux innocens. Tableaux gracieux lithographiés par Aubry. Les petites scènes, rondes, airs nouveaux avec la musique sont de Mr le Chevalier De Piss, Paris, Augustin Le Grand, Éditeur (Source : Kulturenbe Niedersachsen)
[4] ↑ «V. Les Volans», in L'Étude et la récréation : abécédaire physique et moral des jeux de l’enfance, Paris, Ledentu Libraire, 1832 (seconde édition), pp. 70-71.
[5] ↑ Madame de Chabreul, «Le volant», in Jeux et exercices des Jeunes filles, 1890 (6ème édition), Paris, Librairie Hachette et Cie, p. 106.
[6] ↑ Docteur G. Laun [Julien Delauney], «Le Volant à Cornets», in Recueil de jeux et exercices. Pour le Développement des Aptitudes physiques de la jeunesse, Paris, Delarue, Libraire-Éditeur, 1891, p. 110.
[7] ↑ A. Paulin-Désormeaux [1785-1859], Les Amusements de la campagne […] recueillis par plusieurs amateurs […], Tome 4, Chapitre XXII : «Le Volant», Paris, Audot Libraire-Éditeur, 1825, pp. 222-223.
La même description se retrouve dans Henri-René d’Allemagne, Musée rétrospectif de la classe 100 Jeux à l’exposition Universelle Internationale de 1900, à Paris, Tome Ier, 1903, p. 216 .
[8] ↑ Paul de Kock, La Bouquetière du Château-d’Eau, Tome 1, Paris, A. Degorce-Cadot Éditeur, 1876, pp. 128-129. La première édition daterait de 1954, selon la notice biographique que consacre à «Kock (Charles-Paul de)» le Grand Dictionnaire Universel du XXIème siècle, de Pierre Larousse, tome 6, pp. 1236-1237.
[9] ↑ Mme Gustave Demoulin, autrice de Les Jouets d’enfants, Paris, Librairie Hachette, 1889 (3 ème édition), p. 134 . Édition originale 1882.
[10] ↑ Napoléon Laisné, «Jeu de l’Entonnoir-Volant», in Gymnastique des demoiselles à l’usage des Écoles Normales de lycées et collèges de jeunes filles des pensions et des école s.Ouvrage indispensable aux aspirantes aux brevets de capacité, Paris, Librairie Picard-Bernheim et Cie, 1883, 5ème édition, pp. 181-183.
[11] ↑ Louis Harquevaux et L. Pelletier, 200 jeux d’enfants en plein air et à la maison, Paris, Librairie Larousse, 1893, 5ème édition), p. 23-24.
[12] ↑ Henry Rabusson, L’Aventure de Mlle de Saint-Alais, 1885 (8ème édition), pp. 318-320.
Annexe : Notice accompagnant le jeu de «Par-Ball»