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Publié par Frédéric Baillette

    Dans un précédent texte nous nous sommes intéressés aux Hornbooks, ces premiers abécédaires anglo-saxons, apparus au milieu du XVème siècle, constituées d'un plaquette en bois de la forme d'un battoir sur lequel étaient «imprimés» l'alphabet, un syllabaire et diverses écritures (pieuses). Ce «livre» d'étude qui pouvait, par ailleurs, être utilisé par les jeunes enfants pour se divertir en jouant au volant fut, à partir du milieu du XVIIIème siècle, progressivement remplacé par une version constituée de carton rigide et pliable, rapidement agrémenté de gravures rendant cet outil de travail scolaire bien plus attractif. Des illustrations qui parlaient aux enfants, en faisant référence à leur quotidien et notamment (pour ce qui nous intéresse) au battledore and shuttlecock, soit au jeu du volant.

 

Impression de l'intérieur d'un exemplaire de «The Imperial Battledoor», London Newberry, vers 1795


    En France, les jeunes élèves ne disposèrent pas de tels hornbooks ou «battoirs» (de bois ou de carton) qui puissent aussi leur servir de «raquettes» pour apprendre l'alphabet et s'amuser.
    Vers la fin du Moyen-Âge, les jeunes enfants (issus de l'élite) débutaient la lecture sur des imprimés appelés «Croix de par Dieu» ou «Croix-de-Pardieu» (c'est-à-dire, faites au nom de Dieu), car ornés d'une croix apposée en début de texte, rappelant au jeune lecteur la nécessité de se signer et d'énoncer «croix de par Dieu» avant de commencer l'apprentissage de son alphabet («Savoir sa croix de par Dieu» signifiait connaître ses lettres).
 


    Au XVIème siècle vont apparaître de petits livrets de quelques feuillets, de piètre qualité, diffusés par des colporteurs dans les écoles paroissiales qui s'inspiraient des A.B.C. médiévaux et conserveront le nom de «Croix Depardieu».
    Des abécédaires illustrés ou alphabets en images, illustrant le plus souvent la lettre à apprendre par un objet ou une scènette dont le nom débute par cette lettre, commenceront à être imprimés au début de XIXème siècle, et recourront au Jeu du Volant (ou seulement au Volant) pour imager la lettre V, occasionnellement le J (pour Jeu) et, anecdotiquement, utiliseront une Raquette pour accompagner la lettre R.

    Souvent, à leurs débuts, assortis d'un texte ou de quelques lignes, ces représentations nous renseignent (partiellement) sur l'évolution de la perception du jeu du volant et, par ricochet, sur une facette de la réalité d'une pratique ludique particulièrement appréciée des enfants (mais aussi, comme nous le verrons dans un prochain article, de nombreux adultes).

    Petite visite guidée de ces abc (ou abcd), présentés par ordre chronologique de publication (bien que certaines dates soient approximatives, ou que  certains de ces documents aient fait l'objet de premières publications antérieures à la date indiquée) :
 

1802 - toute première apparition du «jeu du volant» dans un
Abécédaire Gymnastique Orné de beaucoup de gravures

    Le titre repris en page intérieure est bien plus explicite (nous en avons conservé l'orthographe de l'époque) : Abécédaire Gymnastique ou Nouvelle Méthode pour apprendre à lire aux enfans, en les instruisant, et en les amusants par la représentation des différens Jeux et Exercices du Corps auxquels se livre la Jeunesse. Orné de 37 figures, avec des Explications qui leur font connaître les avantages ou les dangers qui peuvent résulter de ces Jeux, Paris, Chez Legras et Cordier, Imprimeurs-Libraires.

    Ce livre d'étude, agrémenté de 37 figures (des vignettes regroupées par six sur une même page), se révèle copieux (96 pages). Il est très certainement à destination des parents (et des maîtres d'école) et s'inscrit dans le courant d'une pédagogie nouvelle prenant en compte la motivation des élèves, en s'inspirant de leurs centres d'intérêts : les Jeux.
    L'introduction défend cette «nouvelle méthode pour apprendre à lire aux enfans», en rupture avec un enseignement traditionnellement insipide (et rebutant). Partant du constat qu'apprendre est «difficile et fastidieux», l'auteur de l'abécédaire propose d'étudier en s'amusant et de mettre les enfants «dans leur propre élément, sur le terrain qui leur est le plus familier ; de les entretenir [...] de ce qu'ils aiment et connaissent le mieux, des jeux !»
    Ce « léger badinage », permettant de franchir «les difficultés des élémens de la lecture», n'est pas que frivolité. Ce biais offre selon l'auteur «plus d'une occasion de donner en passant à nos jeunes élèves des leçons de morale, d'humanité, de prudence, et quelques conseils utiles sur la conservation et l'affermissement de leur santé. » (cf. p. 3)
    Ainsi à la suite des lettres de l'alphabet, d'un syllabaire («pa pe pi po pu »), de mots à épeler («Jou jou, Da da [...] Vo lant [...] La pi dai re, [...] Ex com mu ni ca ti on »), puis de différentes oraisons liées à la liturgie catholique  (le «Notre père », «Je vous salue Marie », etc.), puis de pages sur les quatre continents assorties de commentaires («Il fait si chaud en Afrique, que la plupart des habitants sont Noirs » !), les saisons, l'anatomie de l'homme, etc., cet ouvrage se conclut par un chapitre d'une cinquantaine de pages de «Conversations sur les jeux entre un père et ses enfans», rythmées par des planches d'illustrations (pp. 35-84). Y sont ainsi présentés des jeux aujourd'hui quasiment oubliés ou totalement passés de mode, certains supposés n'intéresser que les garçons (Tambour, Balle au mur, Toupie ou Sabot, Bascule, Main-Chaude, Barres ou encore Cheval-Fondu et Semelle, un jeu qui réchauffe les pieds des «petits polissons»), d'autres ne pouvant divertir que les «petites filles» (Poupée, Balançoire, Queue du Loup) et quelques uns intéressant les deux sexes, comme Colin-Maillard, Cligne-Musette, Le Pied de Bœuf, ou encore Le Volant. Un jeu qui paraît à la tranquille Eugénie «donner un exercice agréable sans fatiguer» (voir texte ci-dessous) et qui, d'après l'illustration (voir ci-dessus), pouvait se pratiquer alors entre frères et sœurs.
    «Le Père» rappelant la règle de base de ce jeu d'habileté» : s'appliquer à bien renvoyer le volant, afin de multiplier les échanges sans «laisser tomber le volant».


Ci-dessous, la planche des six vignettes où figure «Le Volant» :

 

1830-1848 - Alphabet Gymnastique Dédié aux Enfants Studieux.
Orné de 26 gravures. Paris, Locard et Davi Éditeurs. 72 pages.


    Le terme générique «gymnastique» présentant cet alphabet englobe ici tous les jeux traditionnels de l'enfance. Le but visé est de s'amuser afin de délasser l'esprit des «enfants studieux», de leur donner une parenthèse ludique pour se «récréer» tout en exerçant et fortifiant leur corps, suivant ainsi les préceptes des traités philosophiques et pédagogiques qui redonnent alors au corps une place trop longtemps oubliée au sein de l'éducation (si ce n'est comme lieu de punitions).

    Sur l'image, le jeu du Volant illustrant la lettre V met en scène deux jeunes garçons, indiquant que ce jeu était alors aussi un amusement partagé par les garçons et leur convenant tout autant qu'aux demoiselles (la lettre U correspond à «l'Uscolier ou ascolier», décrit comme un ancien jeu d'équilibre qui aujourd'hui  s'apparenterait à un travail de proprioception - le X est illustré par le «Xercolin» (!?) plus connu sous «jeu du franc carreau», consistant à lancer une pièce ou une médaille en l'air et à la faire retomber impeccablement sur un des carreaux d'un appartement - les sols des belles maisons étant alors pavés de carreaux...).

    L'auteur de cet alphabet «gymnastique» donne, aux joueurs de Volant, quelques conseils quant au choix du matériel et à la tenue de la raquette. Des conseils «techniques» vagues et d'une extrême sobriété, concernant :
    - le positionnement, corps et main devant éviter tout mouvements parasites, en ne changeant «pas pour ainsi dire de place» ! Et en s'appliquant à réaliser des mouvements «du bras très-doux» ;
    - la tenue de raquette : «à peu près droite» et la trajectoire du volant, rectiligne : «tenu à peu de hauteur horizontalement».
    Des recommandations minimales bien mises en pratique par les deux joueurs représentés qui, «de cette manière», devraient pouvoir «faire des parties de deux à trois cents coups» et, pourquoi pas, «en compter jusqu'à mille» ! Le jeu du volant est ici, comme précédemment, essentiellement présenté comme un jeu de coopération et d'entraide (ce qu'il n'était toutefois pas toujours le cas...).
 

 

1832 (seconde édition) - L'Étude et la Récréation. Abécédaire physique et moral des Jeux de l'Enfance. Orné de 35 figures. Paris, Ledentu Librairie. 96 pages.
 

    Cet épais ouvrage mêlant études et récréations, dont le bas de la 1ère de couverture est ornée d'une paire de raquettes et d'un volant, présente à partir de la page 46 un «Tableau Alphabétique des jeux les plus chers à l'enfance».
    Des jeux qui  «sont une besoin pour l'enfance ; [car] ils délassent l'esprit et fortifient le corps». Les «enfans» sont donc invités à jouer «de tout [leur] cœur dans les momens de récréation », pour ensuite se remettre avec tout autant «d'ardeur au travail, quand vient à sonner l'heure qui vous y rappelle. »
    Les jeux sont ainsi vu à la fois comme un temps de détente, de décompression (dirions nous aujourd'hui) et une sorte de récompense.

    L'auteur donne corps à son alphabet en illustrant chaque lettre par un jeu :
    - des jeux au goût des petites filles plutôt gentillets (escarpolette, «diable» - l'actuel diabolo) ;
    - des jeux ciblant essentiellement les «petits garçons», dont certains font l'objet de mises en gardes contre les dangers qu'il renferment, tels La Fronde ou La Glissoire (qui fait mal au derrière). D'autres, comme la Marelle excluent les petites filles : «une demoiselle ne saute pas à cloche-pied » ! La Marelle était alors souvent présentée comme une activité de garçons... Tandis que le Volant reste encore une activité mixte, jouée entre frères et sœurs (et nous le verrons bientôt, plutôt entre les grandes sœurs et leurs petits frères).

    Si les garçons armés de raquettes renforcent la souplesse de leurs muscles,  en s'exerçant au Tamis, se renvoyant «la balle avec une force, une adresse qui étonnent tout le monde», frères et sœurs (ou cousins et cousines) se retrouvent ensemble pour jouer «une belle partie de Volans». Si les uns y jouent «à l'ancienne» avec des raquettes, d'autres y jouent avec des cornets. Le « volant aux cornets » était une des variantes du jeu du volant (nous reviendrons dans un prochain article sur les nombreuses déclinaisons de ce jeu). Le volant était placé dans un entonnoir (un cornet) fixé à une tige d'une trentaine/quarantaine de centimètres. Le but était de le lancer à son vis-à-vis qui tentait de le récupérer dans son cornet. Ce qui ne devait pas être vraiment facile... Ce jeu de salon se pratiquant souvent assis, il était donc également connu sous le nom de «volant assis». Aussi l'auteur de l'abécédaire indique-t-il qu'«avec les cornets on prend moins d'exercice».

 

 

1851 - Alphabet Illustré des Jeux de l'Enfance. Contenant des Exercices de Lecture, l'explication des Jeux de l'Enfance les plus intéressants,
un choix de Fables en prose et en vers
,
Paris, Delarue Libraire-Éditeur. Vignettes par H. Émy.


    Un ouvrage à consonances catholique, dont la partie suivant le syllabaire, débute par «Dieu a créé toutes les choses qui existent sur la terre» et au-delà (étoiles, soleil «qui nous éclaire et nous échauffe») (p. 23). Un chapitre qui se conclu par un constat à méditer : «Tout a été créé sur la terre pour le bien de l'homme ; c'est à lui d'en profiter» (p. 28).
    Aussi, les enfants doivent «rendre hommage au créateur», «honorer» leurs parents à qui ils ont le devoir d'obéir, ne pas mentir, et rendre service à leur prochain (p. 30).

    Alors que précédemment les garçons tiraient à l'arbalète, ici c'est avec un Arc et des flèches qu'ils visent une cible, tout en faisant «attention de ne jamais tirer sur personne» (p. 38). Ils s'exercent également avec une Fronde à envoyer une pierre le plus loin possible ou «le plus près d'un but indiqué», dans des «endroits isolés, en pleine campagne», là où on ne risque pas de blesser, ou tuer, personne ! Et sans «se lancer des pierres les uns contre les autres afin d'éviter les malheurs» (p. 48).

    Durant « le temps de leur récréation», garçons et filles jouent à faire des «Bulles de savon», à « Colin-maillard », à la «Ronde» et, bien sûr, à la lettre V, au «Volant», en dosant leur frappes, «sans frapper trop fort» au risque d'envoyer le volant trop loin et de faire perdre la partie à son «partenaire» de jeu.
     Le texte nous rappelle que lorsque plusieurs joueurs/joueuses sont présents, ils se relayent, en prenant la place de celui qui a manqué le volant.
    Même conseil d'imperturbabilité, presque d'immobilité : «pour y jouer avec succès», il ne faut «ni s'agiter, ni courir de côté et d'autre». Pas de mouvements désordonnés, intempestifs, mais de l'application et de la sérénité. La gesticulation, l'affolement corporel, avec ses sudations, n'est pas de mise pour des enfants et des dames de la bonne société !

 

1851 - Récréation des petites filles. Alphabet
(réédition d'après l'originale en 2013, Paris, Hachette-BnF)

    Très peu de choses dans cet alphabet qui renferme neuf images sans vraiment de rapport direct avec son titre, si ce n'est surtout celle du Volant et du Cerceau placée en page de garde de cette «Récréation» qui n'en offre guère...

    Dessin accompagné de la légende suivante :
«La Récréation. Le volant et le cerceau ».

 

1850 (Vers) - Le Livre d'images. Alphabet des Petites Filles,
Paris, Librairie Théodore Lefèvre et Cie.

    «Dans cet abécédaire destiné aux petites filles, celles-ci sont mises en scène dans des situations de la vie quotidienne [révélant] ce qu'était leur modèle éducatif dans les années 1850.» (extrait de la notice présentant ce livre)

    Le Jeu du volant est représenté à deux reprises (avec les mêmes fillettes). Une première fois au bas de la page consacrée aux Minuscules et aux Voyelles. La seconde pour illustrer la lettre J - comme Jeu (du volant).
 

 

 

1855 - Kaléidoscope. Alphabet progressif des vingt-cinq lettres illustrées, Maison Martinet, Paris. Lithographies de Godard à Paris, Imprimeur Simon Rançon.

    L'album contient 24 planches lithographiées par Henry Emy (1820-1874), dessinateur et lithographe, par ailleurs illustrateur d'ouvrages pour les enfants sous le nom de Télory.
    Chaque lettre imprimée en majuscule et en relief, placée au centre de la planche, est entourée de plusieurs occurrences, mentionnées sous l'image.
 

 

 

1857 - Alphabet des Jeux de l'Enfance. Orné d'un grand nombre de jolies figures, par Hocquart (Édouard - 1789-1870), Paris, J. Langlumé et Peltier. 48 pages.

    Après notamment des «petites phrases faciles» (telles que «le paresseux meurent de faim quand ils sont vieux»), suivies de «phrases un peu plus longues. Tirées de l'écriture Sainte», puis de «la journée du petit Colin» (un modèle de bonne conduite que doit imiter tout enfant qui veut se faire aimer de Dieu et de ses parents), après des Prières du Matin et du Soir et une série de courtes «Leçons» (géographie, histoire, arithmétique), l'ouvrage se termine par des vignettes illustrant chaque lettres de l'alphabet et la présentation succincte des différents jeux utilisés (à côté d'occupations plus habituelles, apparaissent le Loto, le Kaléidoscope, et Le Saut).

    Le jeu du Volant qui instruit un V, autour des branches duquel s'enroule une Vipère, s'affirme ici comme un passe-temps convenant  «aux petites demoiselles» qui, comme sur cette représentation, peuvent y jouer avec leur plus jeune frère. Les (grands) garçons préférant se tourner vers le jeu de balle.
   

 

 

1859 - L'Alphabet en Action, Paris, Amédée Bédelet Éditeur. 54 pages.

    Essentiellement des lettres Majuscules, minuscules, rondes (avec des pleins et des déliés), calligraphiées à l'Anglaise et un syllabaire très réduit, avant une série de planches constituées chacune de deux dessins au trait, tout deux correspondant à une même lettre de l'alphabet.
    La Lettre V étant ainsi illustrée à la fois par deux Voyageurs (un fils et son père arpentant une contrée montagneuse) et par une partie de Volant entre filles, sans doute grande et petite sœur.
    Si les garçons jouent à la Bascule ou au Ballon, s'ils se battent à l'épée, font des Glissages ou jouent encore à Saute mouton, les filles sautent à la Corde, font la Dinette, se balancent mollement sur une Escarpolette, cueillent des Fleurs et jouent au Volant.
    Le seul Jeu commun aux deux sexes est celui des Hannetons, un «amusement» que l'on rencontrait dans plusieurs abécédaires qui consistait à attacher un fin fil à la patte du coléoptère puis à le laisser s'envoler tout en le retenant captif à la manière d'un cerf-volant...
    À noter que la lettre X est mise en valeur par deux termes rares : Xilographie (procédé de reproduction d'images ou de textes gravés sur du bois) et Xystiques (athlètes qui dans l'Antiquité s'exerçaient dans Le Xyste, salle couverte réservée aux exercices du corps)...

 

1860 - Alphabet Illustré. 80 vignettes et lettres ornées.
Dessinées par K. Girardet, Sagot et Werner. Gravées par Piaud.
Tours, Ad Mame et Cie, Imprimeurs-Libraires. 104 pages.

    Le jeu du volant ne présente plus la lettre V mais le R, comme Ra-que-te (c'est désormais la Va-che qui commence à détrôner le Volant) !
    Jouer à la Raquette, bien que moins usité, signifiait alors jouer au Volant. Les deux enfants y jouent ici dans la cour de la demeure familiale, au risque de l'envoyer par-dessus le muret d'enceinte. Une mésaventure advenue au petit Michel, un garçon qui ne pouvait s'empêcher de jouer «trop fort», comptée en 1878 par P.-J. Stahl dans La Chasse au volant. Une historiette en image à retrouver sur ce même blog !
 

 

1865 - Nouvel Alphabet des Jeux et récréations de l'enfance
illustré de nombreuses gravures
,
Paris, Bernardin-Béchet, Librairie-Éditeur. 74 pages.
Réédité en 1867, sous le titre
Alphabet des Jeux et récréations de l'enfance, 107 pages.
 

    Tandis que ces jeunes filles s'égayent, un jeune homme de bonne famille (ami ou cousin) attend son tour pour, peut-être, profiter de l'occasion pour engager conversation. Cette saynète nous rappelle que le jeu du volant pouvait se révéler un temps de connivences partagé en galante compagnie, un moment de relâchement, de rires, où s'échangeaient aussi des regards, des mots doux, des frôlements (propices au coup de foudre). Ainsi dans un cadre bucolique propice à compter fleurette pouvaient naître des passions et se souder des destins (voir "Les Jeux de l'Amour et du Volant").
 

 

 

1874 - Bébé saura bientôt lire. Nouvel alphabet illustré par Mme Doudet.
Paris, Librairie Théodore Lefèvre et Cie — Émile Guérin, Éditeur. 48 pages.
 

 

1870-1880 (vers) - Alphabet des Fillettes


    Si deux volants ornent les coins inférieurs de l'illustration de couverture, encadrant une raquette quelque peu tarabiscotée, point de jeu du volant à l'intérieur de cet Alphabet, mais l'apparition du «Lawn-ten-nis» (tennis sur herbe ou gazon). Nom originel anglais du Tennis, très usité en France. La Fédération Française de Tennis portera, jusqu'en 1976, le nom de Fédération Française de Lawn-tennis. Une activité alors élitiste à laquelle s'adonnaient garçons et filles. Un jeune joueur figure d'ailleurs dans cette scène, a priori, exclusivement féminine.
 

 

1885 - Alphabet, par Kate Greenaway
Paris, Librairie Hachette et Cie

    Kate Greenaway (1846-1901), est une dessinatrice et aquarelliste anglaise spécialisée dans l'illustration de livres pour enfant, dans lesquels elle a réalisé de très belles gravures, principalement de demoiselles habillées à la mode du début du XIXème siècle, jouant du volant. Des publications anglaises - comme dans Book of Games (1889) - mais aussi des éditions françaises : La Lanterne magique de J. Levoisin (Vers 1880, Paris, Librairie Hachette, p. 33 et 41) et chez ce même éditeur un alphabet pour très jeunes enfants, ne comportant qu'une seule lettre par page, dont celle-ci :

 

1888 - Alphabet des Récréations enfantines, par A. Des Tilleuls.
Illustré de 30 gravures par Gerlier,
Paris, Bernardin-Béchet et Fils, Libraires-Éditeurs.

    La lettre V est à la fois illustrée par le traditionnel jeu du Volant, désormais présenté essentiellement comme un jeu de demoiselles, qui, sur cette image, adoptent toutefois des attitudes bien plus dynamiques, avec un engagement du corps dans sa frappe pour l'une et un bel armé de revers pour sa partenaire.
    Montés sur des Vélocipèdes, deux garçons, plus délurés, déboulent à «grande vitesse»  !

 

1890 - Alphabet des Jeux. Paris, A. Capendu Éditeur.

   Consacre uniquement sa couverture au «jeu du volant», avec une grande sœur échangeant avec son jeune frère, dans l'allée d'un parc public ou d'un jardin particulier. Une représentation à la composition similaire se retrouve dans l'Alphabet de ma petite fille, publié la même année (voir ci-après).
    Les manches des raquettes apparaissent ici décorés. Ce ne sont pas de vulgaires raquettes de bois brut mais des jouets plus travaillés marqueurs d'une différence sociale. Vers la fin du XIXème siècle, apparaissent ainsi «des raquettes très fantaisistes, avec manches recouverts de soie brodée, de peluche unie sur laquelle s'enroule une devise quelconque. Le bois du cadre [peut être] en bois précieux ; le volant bleu, rose, rouge, mauve, est assorti à la couleur de la garniture du manche», observe Marjolaine, dans son article «La Mode» paru le 9 août 1892 dans le quotidien Le XXème Siècle.
  

    Dans les pages intérieures ré-apparaît le Lawn-Tennis.

 

1890 - Alphabet de ma petite fille.
Illustré de 6 Gravures en Chromo, «Bibliothèques des bébés»,
Paris, Bernardin-Béchet & Fils, Libraires-Éditeurs. 14 pages.
 

 

 

1890 (vers), Alphabet amusant pour les petites filles,
Imagerie de Pont-à-Mousson, Éditeur Louis Vagne

 

    Le jeu du volant, va également faire l'objet de mises en images dans des chromos publicitaires, dédiés au lettres de l'alphabet, à collectionner, ou sur des planches alphabétiques illustrées, comme cet Alphabet des petites filles édité par L'Imagerie d'Épinal :

1891 : Alphabet des petites filles.
L'Imagerie d'Épinal, Estampe n° 333. Pellerin et Cie, imprimeur-éditeur.

 

1897 : ABC des Joujoux ou Alphabet des tout petits
Gravures de Gaston Quenioux (1864-1951)

 

Fin XIXème - début XXème :
Voir sur ce même blog :
« Chromolithographie, Chromos, Éphéméras et jeu du volant »


Vers 1900 - Chomo publicitaire pour le Chocolat Suchard
V, comme «Vacances, Voiture, Vent, Vin, etc.»
(mention imprimée au verso)

 

1900 (Vers) - Alphabet de la Phosphatine Falières. Illustrations de T. Lobrichon. Édité par la Phosphatine Falières. 20 pages illustrées.

    Ici, c'est la lettre R - comme Raquette -, qu'illustre le jeu du volant, avec une nouvelle fois une prise en revers, plutôt bien captée par l'artiste.
    La lettre V est portée par une Voiture pour enfants (un charriot à roulettes tracté par une équipage composé d'une fille et d'un garçon).
 


    Vers la fin du XIXème siècles la Phosphatine Falières avait déjà édité un Alphabet de 16 pages chromolithographiées, afin de promouvoir bouillies pour bébés et aliments pour enfants enrichis en phosphate de calcium. La lettre R servait alors quasiment de filet avant l'heure, pour une partie de double mixte !

 

1900-1920 (Vers) - L'Alphabet des Vacances par Raymond de La Nézière
Paris, Éditions du Petit Écho de la Mode.

    De La Nézière (1865-1953) était un célèbre illustrateur et caricaturiste qui collabora à plusieurs revues enfantines (La Semaine de Suzette, Le Jeudi de la Jeunesse) mais aussi à des revues satiriques (La Baïonnette, Le Rire, L'Assiette au Beurre, etc.).
    Cette illustration fait parti d'une planche consacrée aux lettres V, W et X. Regroupées par quatre, ces différentes planches ont fait l'objet d'une republication dans les années 60, sous forme de posters (55 x 43 cm) par Bernard Carant (Paris).
 



1934 - ABC de Babar de Jean de Brunhoff
Paris, Éditions du Jardin des Modes.

     Le cycle de ces représentations du «jeu du volant» dans des abécédaires, débuté au tout début des années 1800, prend fin avec cette ultime mise en scène de Flore et Alexandre les adorables enfants du Roi Babar.
    Clin d'œil de Jean de Brunhoff à un jeu du passé, encore pratiqué par des enfants au début du XXème siècle, qui va être «remplacé», surtout à partir des années 50, par des versions ludiques du «badminton», prisées par des adultes qui dans leur temps de loisirs (le dimanche ou lors des vacances) vont disputer, par-dessus un filet ou une simple ficelle, des parties de volant conviviales, entre couples d'amis, à la campagne ou sur la plage. Ou, tout simplement, vont s'amuser à se renvoyer un volant sans autre intention que de maintenir en l'air, tout comme leurs (arrières) grands-parents, ce singulier oiseau désormais de plastique emplumé.

    Voir sur ce même blog l'article de Célestine : « Flore et Alexandre Babar jouent au volant ».

 

Prolongements
   Petite incursion chez nos voisins britanniques avec deux illustrations :
    - la couverture d'un ABC publié en 1891, Our Baby's ABC, sur laquelle figure une paire de Battledore and Shuttlecock - mais faute d'avoir pu feuilleter ce document, nous n'avons pu voir si les instruments du jeu illustraient des lettres...
    - Une amusante partie de badminton (à moins que l'illustrateur n'ai voulu simplement représenter une partie de jeu de volant par-dessus un filet de Lawn-tennis ?), publiée en 1898, pour accompagner la lettre R (pour Racket), extraite de Our Brownies ABC.
    Ces deux documents ont été empruntés au post «Alphabet Books - part 6» mis en ligne le 8 janvier 2018 sur le blog «Art and Artits».

Our Baby's ABC, 1891

 

Our Brownies ABC, 1898

 

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